D’abord, merci à Monsieur et Madame Belfond (12, avenue d’Italie 75013 Paris) pour cette publication ; mieux vaut tard, etc.
Cela étant, je ne peux pas m’empêcher de flairer la tentation du bon coup ;
ouais, derrière le succès de 1Q84, je subodore qu’on va maintenant nous
ressortir un florilège de ces dissertations de 3ème... Mais bon,
business is business, et s’agissant de Murakami, vous pouvez y aller,
chuis preneuse. Haruki, c’est mon pote depuis plusieurs décennies.
Envoyez, envoyez...
Des japonaises, je n’en connais pas tant que ça ; y a Mishima
(Maison Showa, vieille école, donc), le mec qui s’est fait seppuku
(putain, que c’était bien, Mishima) et toujours dans les anciens, il y a
l'excellentissime Tanizaki. Et pour être plus modern style, disons,
je connais un peu Yôko Ogawa (Le petit joueur d'échecs sous le coude) et, bien sûr, il y a notre giganteste Murakami dont il est question ici.
Bon,
pour la situasse, Mishima, c’est les quatre “énormes” textes de “la mer de la fertilité”.
Je sais, il y a d’autres bouquins de mestre Mishima, mais si tu n’as
pas lu au moins çà, cours immédiatement te suicider, farang de la tribune Boulogne, quant à Tanizaki c'est tellement connu qu'il te faudrait être sourd, aveugle et tétraplégique pour avoir réussi à l'ignorer.
Et
puis, il y a le surréaliste, l’extraordinaire, l’indispensable camarade
Murakami (Maison Jazzi)... Bon, je ne vais pas te raconter tout
Murakami non plus. Tu n’as qu’à attendre que les bibards empesés de
Stockholm se décident enfin à lui filer le Nobel de littérature. Après, y
sera même dans le Reader digest... tu n’auras plus aucun préteste pour
le bouder ! Mais maintenant on va causer de Underground.
Ce
Mirakami, là, au premier abord, ne ressemblait pas à ce que j’ai
l’habitude de lire de cézigue. C’est purement journalistique... m’enfin,
c’est ce que j’ai trop rapidement cru. En fait, et en avançant dans ce
gros bouquin (presque un 600 pages) notre ami nous distille une
remarquable leçon de philo. C’est parfait, ça pourrait être un cours sur
les mécanismes de la résilience, peut-être, ou plus sûrement, une façon
de circonscrire (digérer ?) le Mal...
Il
y a la griffe de la Hannah Arendt du Procès d’Eichmann dans ce bouquin,
une sorte de regard à distance du mal par le truchement d’une
accumulation de faits ordinaires et objectifs, quasi laconiques, qui finit par tisser une tapisserie extraordinaire.
Ça se présente sous la forme d’une compilation de témoignages ; victimes puis bourreaux.
Une
théorie de témoignages millimétrés qui, strate après strate, nous
plonge, ce 20 mars 1995, dans le métro bondé de Tokyo au moment où les
illuminés de la secte Aum perpétraient une méchante attaque au gaz
sarin.
C’est
du pur Murakami ; il fonctionne comme cela dans ses romans, par
accumulation de petits riens, par une lente accrétion de fragments de
réalité et, au delà de “l’évenement” et de la morale qui s’en dégage, je
jubile d’avoir aperçu les rouages cachés de la machinerie Murakami,
cette façon subtile d’empiler de l'anecdotique pour finalement construire une
méta-structure où tout devient possible, où tous les dérapages sont
envisageables.
En l’occurence, il s'agit d'intégrer la folie
de l’autre comme étant la sienne afin de la comprendre et de la
dépasser.
La comprendre et peut-être, commencer à pardonner...
Merci Ser Murakami, c’était mélancolique et poignant, comm’ d’hab.
Je vous demande de respirer...
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