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lundi 25 juin 2012

À part et passager, Jean Pérol

Oui, oui, je vois bien que tu fais la moue, encore de la polésie, penses-tu, il commence à nous emmerder ce vieux con, ceci-cela...
Cretinus farangus ! Ne comprends-tu pas que la polésie nous est “naturelle” au même titre que l’air ou le Muscadet (bien glace!), que chaque stance est un segment de la réalité du monde, que chaque mot en cisèle les contours avec la précision d’un Milan filoguidé, que chaque vers exhale la couleur des sentiments, que ton aire de Broca entre en communion avec ton tronc cérébral, que tu redeviens prime, vicéral, humide et salé ?
Mouais...
Bon, trêve de conneries, “à part et passager” est un artefact assez singulier à première vue ; pas de ponctuation mais des blancs, quand ce ne sont pas de curieux décalages latéraux dans la mise en page de certains vers ! Des textes noirs et ramassés, presque tapis au centre de la page... brrrr, ça déstabilise un peu, au début, et puis curieusement on s’y fait, on chope la respiration. Et de la respiration il en faut car attention, le Jeannot il en a gros sur la patate, sa polésie est baptisée avec du sang, des tripes et l’odeur de la cordite ; y règle ses comptes au canon de 75 sézigue : la guerre, la mort, l’amour (mort), la puanteur des mots et les multiples formes que peut prendre la décomposition d’une Époque. 
        
         Solide guerre amère
                    où les dieux ont toujours froid
        et les veuves
                du sang d’enfant mort sur les joues
        et les jeunes filles
                    du sang entre les cuisses
        et les journaux rapaces une photo à prendre
        de viscères fumants sous les flashs flingueurs
                       
                            Flingueurs, page 90


Ch’t’avais prévenu, c’est sombre, dense et ça sent la charogne.
Ce Pérol se lit très noir, serré et sans sucre.


Je vous demande de déserter...

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