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dimanche 18 mai 2014

La défaite de la pensée, Alain Finkielkraut

N’en déplaise aux thuriféraires de la “modernerie” qui prennent la fatuité pour de l’érudition, ceux qui confondent vitesse et lumière, monsieur Alain Finkielkraut est là pour nous rappeler à notre devoir. 
Pis d’abord, l’écoutes-tu religieusement tous les samedis matins, entre neuf et dix heures sur France-Cul ? Il s’agit encore une fois d’un passeur, courageux et opiniâtre qui nous fait aimer la Koultoure (avec un “k” majuscule !).
Je ne déconne pas, là, si on veut comprendre l’événement  Finkielkraut, il faut en revenir aux bases et relire cette “La défaite de la pensée” (1986) qui me parait être de toute première importance  avant de plonger dans son petit dernier : L'identité malheureuse.
Bien sûr qu’il a des défauts l’ami Finkielkraut, bien sûr que c’est un maître contraignant ; oui, c’est dur de parcourir le chemin qu’il propose, c’est effarant de s'apercevoir que tout n’a pas démarrer en 1968, qu’il faut toujours en revenir à des Diderot, Condorcet ou Voltaire.
Lichtenberg (1742-1799) faisait donc preuve d’une lucidité prémonitoire lorsqu’il écrivait, il y a deux cents ans : “Aujourd’hui, on cherche partout à répandre le savoir, qui sait si dans quelques siècles, il n’y aura pas des universités pour rétablir l’ancienne ignorance ?”
Mais si l’on n’écoute pas sa petite musique, si plus personne ne suit le chemin proposé par un monstre de la pensée comme lui, que nous restera-t-il ? Sur qu’elles épaules se juchera-t-on pour voir plus loin ? Et oui, nous finirons par avoir ce que nous méritons, des ministres qui nous feront célébrer, tous les 21 juin, la cacophonie d’une nuisance soi-disant culturelle, ou bien d’autres qui pensent qu’au 19ème (y savent plus bien, c'était y a longtemps, quoi), un obscur Zadig était sûrement le nègre d’un certain Voltaire. Et vogue la galère...

C’est être réac que de penser que l’école républicaine est en train de faillir à sa mission et d’ériger la confusion en système de valeur ? de nous fabriquer des cancres savants dans le meilleur des cas ?
C’est être réac de dénoncer toutes les chimères qui nous font prendre un I-phone pour le nec plus ultra de l'artefact culturel alors que ce n’est finalement qu’un stylo-bille.
Le lanceur d’alerte, que le péril soit géologique ou culturel, est-il un horrible réac ? Qui veut nous faire croire cela ? Quel grossium international de la bouillie de masse ?

Il a raison, l’ami Finkielkraut, de nous rappeler que c’est encore nous qui devons tenir le stylo, que toutes ces innovations ne sont que des truchements, qu’il faut encore et toujours en revenir aux Lumières, au XVIIIe, voir l’histoire, bien regarder partout, mesurer, comparer, bref, exercer le droit exigeant à la Liberté, bien capter que nous ne sommes plus seuls depuis que Gutenberg a ouvert le monde à la pensée écrite, que nous pouvons, que dis-je, que nous devons absolument nous précipiter, le vulgum pecus comme toi et moi, sur ce droit acquis par de glorieux prédécesseurs tout en sachant que c’est un droit exigeant comme le serait un devoir, que nous en sommes comptables.
Est-ce si singulier que cela de se déconnecter quelques hecto-secondes de l’Univers Coca-Google, poser ses jouets, tous les jouets, toutes les envies d’être manipulé, commercialement flatté, et d’ouvrir un bouquin, de Voltaire à Boudard ; de savoir que tu relis l’Odyssée d’Omère en dévorant pour la première fois le Cycle de Tschaï du père Jack Vance ; de découvrir le théâtre dramatique entre Sophocle et Anouilh ; ou encore d’écouter un passeur d’idées sur France-Cul, d’Onfray à Finkielkraut. Là est notre liberté, dans ces lieux et ces moments  interstitiels qui commandent à notre survie ontologique, et qui n’ont rien à voir avec la modernitude, Dieu merci.
Il s’agit bien d’être curieux et intéressé car tout est là, sous notre nez, il suffit maintenant de suivre les petits cailloux blancs qu’ont semé des Adorno, des Levinas, des Jankélévitch ou des Finkielkraut, par exemple, il suffit juste de marcher dans leurs pas... ou du moins d'essayer.

Bravo et merci ami Alain ; j’espère que tu fustigeras longtemps encore l'imbécillité crasse des sycophantes peuplant nos agoras et la mauvaise foi des salopards qui hurlent avec les marchands de lessive.
(Hé, t’as une rapière maintenant… tschac ! tschac ! tu peux leur couper les couilles, ‘tain !)

Oui, Monsieur Alain Finkielkraut est mon ami, c'est pour cela que je l’appelle mon ami.


Alain Finkielkraut





Benzaiiiii...







©Marcel Nino Pajot

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