Pages

jeudi 3 septembre 2015

Diderot, le génie débraillé, Sophie Chauveau

Oncques ne lut biographie aussi romanesque, aussi passionnante, aussi fluide et agréable... si ce ne sont celles commises par Dame Mona Ozouf !
Force est de le constater, la jouvencelle Sophie a réellement réussi à me plonger dans la subjectivité d’un mec qui s’appelait Denis Diderot.
Ah, noble ami que ce Denis, dans la lignée de ses deux maîtres, Montesquieu et Voltaire ; il sera l’égal d’un Rousseau, d’un D’Alembert ou d’un La Condamine.
Bien sûr, farang-conseilliste, tu connais cézigue grâce à sa monumentale Encyclopédie… mais si ! Son nom est toujours accolé à celui de D’Alembert... ça te revient ? L’Encyclopédie de Diderot et D’Alembert.
Et ouais, c’est l'ancêtre de wiki ! (©DenipédiA est ton ami). Cela dit, c’est lui qui en porta les premiers volumes sur ses épaules tandis que d’Alambert papillonnait, apparemment plus occupé à rechercher honneurs et gratifications auprès des Grands.

En vérité, rien de plus savoureux qu’une biographie dès lors que l’auteur d’icelle en pince pour son sujet, qu’il en est amoureux.
Je sais, on a déjà lu nombre de bio à charge, et comment ne le seraient-elles pas quand un vaillant historiographe s'attelle à te faire partager le quotidien de monstruosités telles que : Néron, Gengis Khan, Guillaume II, Margaret Thatcher, Gourbanguli Berdimoukhamedov, ou Kim Jong-il ? D'insignes enfoirés qui ne sont aimables que le matin, quand ils font caca...

Hors donc, la miss Sophie elle l’aime son Denis, même débraillé, ça se sent à toutes les pages qu’elle est amoureuse cette fille. Du coup, on l’aime aussi à l’ami Diderot, car d’une part la formidable maîtrise de son art et l'enthousiasme évident de la biographe nous emporte jusqu’à des nuits blanches, voire ultra-violettes, et d’autre part, je me demande quel énergumène n’aimerait pas l’homme Diderot ! Une âme noble, lévinassienne ; un géant altruiste et un parfait aficionado de Montesquieu et Voltaire.  
Un parcours remarquable, une lumière parmi les Lumières dont le XVIIIe n’a pas été avare.
Il naît à Langres en 1713 ; famille de coutelier, père rigide, mère soumise, une soeur adorée (Denise), un frère cadet détestable (Didier) et une autre petite soeur qui mourra de “religion”. Suite à un parcours sans faute chez les jésuites du coin, son père lui voit une carrière toute tracée dans la curetonnaille. Voila donc l’ami Denis qui débarque à Paris en 1728 pour faire son grand séminaire. Au grand dam du daron, il va alors faire durer ses études tant qu’il pourra, deux ans de philo, trois ans de théologie… Il ne veut pas revenir à Langres faire le curé (il les hait), et on sait tous qu’il ne l’a pas fait ; tant mieux pour nous ! Non, il va enchaîner les petits boulots de clerc, traîner dans le Paname interlope, tâter de l’écriture, du théâtre, de la traduction et de la misère jusque dans les année 40.
Attention, c’est la mauvaise période Louis XV, la censure sévit ; première incarcération au château de Vincennes. Puis il rencontre Rousseau, Condillac, D’Alambert, Buffon, D'Holbach, Malesherbes, etc.
La suite, c’est L’Encyclopédie, le théâtre, et la foultitude de textes qu’il nous a légué en héritage. Hélas, il mourra en 1784 et n’assistera donc pas au brasier de la Révolution qu’il contribua à allumer.

Diderot était l'homme de tous les superlatifs ; il ne mangeait pas, il dévorait ; il n’écrivait pas, il dénonçait ; il n’aimait pas il adorait ; il ne travaillait pas, il abattait. Tellement fidèle en amitié qu’il en bêtifiait ; tellement infidèle à sa femme qu’il resta avec elle jusqu’à la fin ; tant d’amantes de qualités ; tant de joie, de peurs, de bonheur de vivre… pfiou ! Quel monsieur ce Diderot ; un stakhanoviste de la vie !

Je t’invite à constater tout cela par toi-même en lisant les 560 pages de ce livre.

Si j’avais un seul regret à formuler après avoir dévoré cette pépite, c’est d’avoir découvert que Rousseau s’avéra être un sale con, méchant, pleutre, fourbe et vindicatif, à l'encontre de Diderot … 
Ça m’a gâché tout mon «Contrat Social»,’tain !

Oh oui, Sophie Chauveau, j’ai aimé ton «génie débraillé» et je ne vais pas manquer de plonger sans tarder dans ton «Siècle de Florence»... 
Encore merci ma chère.


Sophie Chauveau





Sophie… Oh, Sophie...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire