Mes cadets, pas facile de parler de ce bouquin !
Pour
l’historiette, faut dire que c’est mon autre nuisible favoris du marché
de St Aubin qui me l’a mis d’autor dans le cabas, dimanche dernier.
Nounours je le surblase (j’ai jamais osé lui dire, l’est assez balèze,
genre ancien rugbyman, caftez pas, hein ?), propriétaire de l'excellente
librairie Minimum, sise 37 Rue Pargaminières, à Toulouse, congue.
Ouais, je ne choisis pas mes bouquins avec des mecs comme ça, ces salops
m’ont dans le collimateur, à peine tu renifles leur étal qu’ils se
pointent et te travaillent à la Julien Lepers : t’as intérêt à être un Champion pour garder leur amitié et leurs loyaux services.
- Salut, t’as lu ça ? Ok, bien... et ça ? bon, attends... et çui-là ?, etc.
Rêve
pas, on est baisé d’avance, ces enfoirés connaissent tout ; c’est leur
taff, après tout ! Donc, à m’ment donné, y a un bouquin que tu n’as
jamais vu. Là, le Nounours, y te regarde comme si t’avais marché dans
une grosse merde, t’es au fond du trou ; tu prends ton bouquin, ta honte
et tu jettes le tout au milieu des légumes et du poulet rôti dominical,
contrit mais reconnaissant.
Qu’est-ce que je les aime, mes bouquinistes ! Ils m’ont fait découvrir de ces merveilles...
Que le Grand Patriçounet Doré les garde en Sa Sainte Prostate.
Aum...
Bon, passons au salon, finalement.
Attention chef-d’oeuvre... discret !
Une autre fable philosophique totalement Borgessienne.
Voilà,
sur une île perdue, un fugitif s’éprend d’une femme. Enfin, il s’agit
plutôt de l’image de cette femme qui fut prise à son insu par le savant
Morel, dix ans auparavant et qui “filma” pendant une semaine le groupe
dont elle faisait partie.
Attention, farang
trop pressé, il ne s’agit pas d’un film à proprement parler, mais d’un
système, abscons et infaillible conçu par le fameux Morel, qui capture
l’intégrité du ou des personnages placés dans son focus (physiquement, historiquement, ontologiquement ; le moindre gramme, la moindre pensée, tout, quoi). Aucun moyen de
différencier l’original de la copie !
La
copie ignorant, bien sûr, sa nature de copie, est contrainte de
rejouer éternellement la même séquence, assujettie à la machine complexe
(le “projeceteur”) sise sur cette île ; ouais, l’énergie qui meut tout
ce bordel est elle même subordonnée aux phénomènes de marées qui balaient
cet îlot maudit.
Le scénar de l’ami Morel se rejoue donc éternellement au gré des marées.
Ah oui, j’oubliais, quand t’as été “filmé”, tu meurs, t’es comm’ qui dirait irradié... dix jours maxi !
Bien.
T’imagine mieux maintenant dans quel espèce de merdier s’est fourré le
narrateur, hein ? Pis ch't'ai déjà dit, ce grand couillon va tomber amoureux d’une des
“actrices” involontaire et par nature inaccessible de ce méta-film.
La
téléonomie de ce récit condamnera finalement le pauvre mec qui se retrouve au milieu
de cette embrouille infernale à trouver une solution extrêmement astucieuse et
“originale”.
Question :
Une parfaite copie peut-elle valoir l’original ?
Nounours est décidément mon ami.
Je vous demande de vous dupliquer...
Incroyable ! Ce livre a fait l'objet d'un téléfilm en 1967. J'avais trouvé l'histoire extraordinaire et je le cherche sans succès depuis longtemps.
RépondreSupprimerSur le sites de ciné IMDB (qui est ma bible), je viens de le trouver et je ne savais pas qu'il avait été tiré d'un livre.
Je le veux je le veux, je le veux...
Bravo Nounours, merci Serguei !
Tu peux considérer qu'il est tien, mon chéri.
RépondreSupprimerA ta dispo en mon humble bicoque et ne t'affole pas, il n'y a pas de liste d'attente pour y accéder, hein, mes glorieux collègues ne sont intellectuellement pas équipés pour lire ce genre de textes; ce ne sont que des ingénieurs, après tout...