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mercredi 4 mars 2015

La Tristesse du Samouraï, Victor del Arbol

Le meilleur bouquin qui me soit passé entre les pognes depuis le Anima de l’ami Wajdi Mouawad, en juin 2014 ; cette tristesse du samouraï est une tuerie ! 

Pourquoi ?

Pasque ce roman noir, policier et historique, est fabriqué comme un meuble complexe et précieux, magique et millimétré ; tous les tiroirs de cette formidable marqueterie littéraire s’emboîtent, coulissent et dégueulent la sanie des vilains secrets du franquisme. Des marionnettes tristes qui s’agitent par saccades désespérées en sont extirpées, rouvrant par leurs gesticulations asynchrones les plaies de la guerre d’Espagne sur plusieurs générations. Un théâtre d’ombres, un tourbillon de destins qui se poursuivent et se superposent dans la noirceur du début des années 40, qui sautillent de la division Azul et des camps sibériens aux règlements de comptes dans les méchantes cellottes ibères des années 50, et puis qui se concluront dans une épiphanie mortifère sous les scialytiques d’un bloc opératoire, ou sous les ors des Cortes, le 23 février 1981.
- Pourquoi pleurez-vous ? N’ayez pas peur. Vous verrez, tout va bien se passer.
Maria secoua la tête. Elle n’avait plus de larmes pour elle. Elle pleurait sur l’incompréhension, sur le désespoir muet de vivre dans un monde dont elle ne comprendrait jamais les règles. Les hommes mouraient, tuaient, trahissaient leurs idéaux, embarquaient un peuple entier dans des guerres fratricides, et elle ne comprenait pas pourquoi. Pour le pouvoir, tel est le seul mobile qui mobilise les hommes, le pouvoir, lui avait dit son père un jour. Mais le pouvoir était une chose absurde, abstraite, minuscule et inutile. Il suffisait d’entrer en salle d’opération pour comprendre que les aspirations humaines étaient dérisoires.
(Chapitre 31, p 471)

Ce salaud de Victor del Arbol est un vicieux, c’est un artiste, certes, mais c’est un vicieux !
Il nous met à la torture avec sa gestion des séquences temporelles ; monsieur énerve, suggère ; monsieur consent quelques indices, puis au chapitre suivant, nous empêche de respirer pendant plusieurs pages dans un rebrousse-temps noir comme la nuit ; et on souffle à nouveau, le temps d’avaler une goulée, quelques paragraphes ; et il nous noie derechef dans le sordide et la folie… Ce rythme te laissera exsangue.
Et par le truchement de toute la brutalité cynique des salauds qui hantent cette histoire, émerge une question ontologiquement incroyable :
Les enfants doivent-ils payer pour les erreurs de leurs parents ?
Autrement dit, qu’en est-il de l’innocence ?


Farang-ispano-républicain, je t’en prie, si ce week-end ton i-phone tombe dans les cabinets et si les enfants ont mis la tablette et le portable dans le lave-vaisselle, ne désespère pas, rien n’est perdu, tu auras au moins le préteste d’ouvrir ce livre ; tu seras manipulé, ensorcelé et subjugué par la maestra historiographique et la précision maléfique du camarde del Arbol... ch’t’assure.


Merci Monsieur Victor del Arbol.


Franco






hijo de puta...

1 commentaire:

  1. Le Spralwebman6 mars 2015 à 22:43

    Putaing, ma vieille farang de pougne de fan de chichoune, celui-là il est beau !

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