Cher Dieu,
Je m’appelle Oscar, j’ai dix ans, j’ai foutu le feu au chat, au chien, à la maison (je crois même que j’ai grillé les poissons rouges) et c’est la première lettre que je t’envoie parce que jusqu’ici, à cause de mes études, j’avais pas le temps.
Je te préviens tout de suite : j’ai horreur d’écrire. Faut vraiment que je sois obligé. Parce qu’écrire c’est guirlande, pompon, risette, ruban, et cetera. Écrire, c’est rien qu’un mensonge qui enjolive. Un truc d’adulte.
...
Il s’agit du début de la première lettre qu’Oscar adresse à Dieu.
Le jeune Oscar est malade et vit désormais à l'hôpital. Du haut de ses dix ans, et en interceptant les conversations des adultes, il a bien compris qu’il va mourir sans tarder.
La dame rose, qui va rapidement devenir Mamie-Rose, est une personne d’un certain âge qui l’accompagnera jusqu’à la fin. C’est d’ailleurs elle qui l’incite à écrire une lettre à Dieu tous les jours, c’est aussi elle qui lui suggère que puisqu’ils sont comptés, chacun d’entre-eux vaudra dix ans.
Et de fait, en douze jours et treize lettres à Dieu, Oscar va vivre sa vie… toute.
Oui, elle est là, toute la vie d’un homme, dans ces douze derniers jours d’un petit garçon, dans ces treize épitres qu’il adresse à Dieu. Et bien que personne ne soit dupe, ces lettres sont d’une justesse sidérante, sans aucun pathos ni compromissions. Quand ils jouent aux «grandes personnes», les mômes sont d’un sérieux absolu.
Il y a juste la sagesse d’un petit garçon qui s’étiole inexorablement et l’amour de cette Mamie universelle qui le portera jusqu’au bout.
C’est la deuxième fois en dix ans que ce petit livre croise ma route et j’ai pris une claque et une leçon à chaque fois.
Ce bouquin est une pépite rare, un trésor précieux, un talisman garant de notre humanité, et si finalement Levinas voit Dieu dans le visage de l’autre, moi j’y vois Oscar, et il est fort probable que nous regardions tous les deux la même chose...
Hélas pour ma sensiblerie pathologique, il existe une quatorzième lettre, la voici :
Cher Dieu
Le petit garçon est mort
Je serai toujours dame rose mais je ne serai plus Mamie-Rose. Je ne l’étais que pour Oscar.
Il s’est éteint ce matin, pendant la demi-heure où ses parents et moi nous sommes allés prendre un café. Il a fait ça sans nous. Je pense qu’il a attendu ce moment-là pour nous épargner. Comme s’il voulait nous éviter la violence de le voir disparaître. C’était lui, en fait, qui veillait sur nous.
J'ai le cœur gros, j'ai le cœur lourd, Oscar y habite et je ne peux pas le chasser. Il faut que je garde encore mes larmes pour moi, jusqu'à ce soir, parce que je ne veux pas comparer ma peine à celle, insurmontable, de ses parents.
Merci de m'avoir fait connaître Oscar. Grâce à lui, j'étais drôle, j'inventais des légendes, je m'y connais même en catch. Grâce à lui, j'ai ri et j'ai connu la joie. Il m'a aidé croire en toi. Je suis pleine d'amour, ça me brûle, il m'en a tant donné que j'en ai pour toutes les années à venir.
A bientôt
Mamie-Rose
P.-S. Les trois derniers jours, Oscar avait posé une pancarte sur sa table de chevet. Je crois que cela te concerne. Il y avait écrit : « Seul Dieu a le droit de me réveiller.».
...
Bon, j'arrête là, j'ai plus de kleenex.
Merci ami Eric-Emmanuel... et merci à Bacon, Einstein, Popcorn, la Chinoise et Peggy Blue d’avoir été les amis de Crâne d’Oeuf (Oscar), et, bien sûr, merci à Mamie-Rose pour toute cette humanité.
JE SUIS OSCAR
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