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jeudi 4 juin 2015

Georges Courteline

Théâtre, Contes, Romans et Nouvelles, Philosophie, Écrits divers et Fragments retrouvés.

Rien que çà ! Je subodore qu’il n’a pas dû en échapper lerche du Courteline dans ce pavetard de l’indispensable collection Bouquins de Robert Laffont - affuré d’occas pour 10 sacs. Tu vois, nous les farangis-impécuniensis, on peut passer une semaine de mille pages très cool pour le prix d’un paquet de clopes. Quel autre média peut-il offrir de telles traversées ?

L’ami George nous plonge dans un tourbillon de personnages et de situations croquignolesques : les cocus magnifiques et pathétiques à la Feydeau, les femmes dignes du piloris tant elles sont enfourbies de la malignité que leur confère une société encore dotée de réflexes archaïques, les turpitudes kafkaïennes de la toute puissance administrative, qui, soit dit en passant, sont toujours parfaitement actuelles avec le magnifique Absolument dé-bor-dée ! de la très contemporaine et très courageuse Aurélie Boullet - je suis sûr que Courteline aurait apprécié la faute d’orthographe patronymique à “boullet” -, et, bien sûr, nous n'échappons pas aux gaietés surréalistes de la vie militaire alors que Jules Grevy était Président de la IIIe ; rappelons-nous qu’à l’époque, si tu tirais le mauvais numéro, t’en prenais pour cinq piges des «Gaietés de l’Escadron»…

Bref, cette compilation de Courteline est un délire de cruautés au deuxième degré appliqué d’une plume de maître à la connerie humaine.
Ça se lit extrêmement vite, son théâtre se joue en un acte, ses contes sont météoriques, sa philosophie a la fulgurance des aphorismes et tu ralentiras à peine dans les romans ; même pour un lecteur un peu rossard et procrastinateur comme toi, ça peut s’envisager sur un mois, pas plus.

Et comme je t’aime bien, farang-post-structuraliste, je veux bien faire l’effort de te refourguer quelques pépites philosophiques dont tu trouveras l’intégralité à partir de la page 800 :

L’homme est un être délicieux ; c’est le roi des animaux. On le dit bouché et féroce, c’est de l’exagération. Il ne montre de férocité qu’aux gens hors d’états de se défendre, et il n’est point de question si obscure qu’elle lui demeure impénétrable : la simple menace d’un coup de pied au derrière ou d’un coup de poing en pleine figure, et il comprend à l’instant même.


La tendance qu’éprouve l’homme à trouver spirituel un propos bêtement méchant, pour peu, seulement, qu’il mette en cause une personne de connaissance, n’est pas un des moindres indices de son excellent naturel.


La vraie pudeur est de cacher ce qui n’est pas beau à faire voir.


Le médecin exerce sur moi une double action dont je ne suis pas maître : il m’effraie et ne me rassure pas. S’il me dit : « Vous avez telle maladie », je le crois ; s’il me dit : « Je vous guérirai », je ne le crois plus.


On ne s’en lasserait pas.

Bravo et merci à l’ami George pour cette kolossal régalade ; demain sur mon bureau pour les amateurs.







- Jusqu’à la gauche ! hurla le capitaine Marjalet.

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