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lundi 25 mai 2015

Portrait du poète en soufi, Abdelwahab Meddeb

Ami Abdelwahab, tu nous manques.

Oui, tu nous a enchanté, presque envoûté durant toutes ces années, sur France-Cul, à nous faire les exégèses croisées de Dante et de Ibn Arabî ou d’un Voltaire, d’un Averroès et d’un Saint Augustin.  
Le petit crétin athée radical que je suis te doit nombre de ses lectures difficiles ou exigeantes, mais je ne me suis jamais tant régalé que dans ce «Portrait du poète en soufi».
Et pour en finir avec Cultures d’Islam, sois rassuré, le petit nouveau, Abdennour Bidar, est vraiment à la hauteur. Bien sûr, je ne te cacherai pas que je pleure le son de ta voix, mais il est bien le petit Bidar, on va s’y faire,  ton émission est entre de bonnes mains je pense.

Quant à ce dernier livre, il s’agit en fait d’une poésie sur le maintenant, sur la vie d’une voyageur d’ici-bas, sur l’amoureux d’un amour qui a pour nom Aya ; un long poème dédié à «la femme», l’extase. Et aussi une magnifique ode célébrant les voyages et les hommes dans la pluralité de leurs temporalités et de leurs conditions.
Un voyage à travers les mondes, les villes et les lieux ; Amériques, Caraïbes, Asie, et bien sûr, Tunis, Paris, le Caire ou Jérusalem. Un voyage tout autour de la planète mais qui reste inexorablement aimanté par le foyer chéri, la méditerranée.
Une épiphanie de lumières, de sons, de saveurs et de poésies ; la poésie d’un Aimé Césaire,  d’un Édouard Glissant ou celle, plus lointaine d’un Maurice Scève parsème ce livre pour en faire une “passerelle entre les mondes”, car sous prétexte de poésie, l’ami Abdelwahab se fait l’ingénieur d’un fabuleux pont entre orient et occident, un chemin au dessus de l’abîme de nos ignorances et de nos préjugés.
Avec ce dernier livre pour ainsi dire testamentaire, il nous offre le monde en héritage, encore faudra-t-il que nous osions franchir l’abîme sur ce fragile et délicat édifice.

Pour conclure, laisse-moi t’offrir le verset 144 de cette magnifique Légende des siècles :

ta voix c’est ta voix
tes yeux ô tes yeux
ton haleine oui ton haleine
ton eau comme elle déborde
y nager truite qui remonte amont
la tocca allume la pointe des os
périnée hanche clavicule
pubis contre pubis
l’un à l’autre frottés
effet de silex
lorsqu’en bouche transite l’amer de l’oreille
parvenu au palais après le sel des larmes
l’alambic recueille goutte après goutte
des liqueurs qui se joignent à tes sueurs
et les mots que tu balbuties donnent la joie
à l’enfant qui survit à l’âge d’homme
éveillé par la fable reçue les yeux ouverts
...


Merci l’ami, c'était merveilleux.







Abdelwahab Meddeb...

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