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mercredi 30 septembre 2015

L’immeuble Yacoubian, Alaa el Aswany

Wouaou !
Y en a pas lerche, dans une année, des bouquins qui te feront ça.

C’est quand je l’ai refermé que j’ai pris conscience que cette plongée dans l’histoire de l’Égypte moderne, ou disons plus précisément dans le Caire des années 2000, a fracassé tous les clichés que j’avais emmagasiné. Je m’estimais pourtant raisonnablement informé sur les turpitudes civilisationnelles multi-millénaires des lascars qui vivent là-bas, au pays des pyramides ; les pharaons, les dix plaies, les Perses, les Grecs, Astérix et Cléopâtre, les Turcs, le canal de Suez, le Protectorat britannique, Nasser, la dictature, la place Tahrir, les frères musulmans et le contrat des Rafales.
Seulement voila, l’ami Alaa el Aswany est un enfant du cru, il sait, il a même sûrement vécu nombre de situasses qu’il décrit, et du coup nous plongeons dans la tête et la vie des gens de cet immeuble Yacoubian, rue Soliman-Pacha (Talaat-Harb), fleuron de l’architecture européenne des années 30.

Subjectivité éclatée en myriades de petits agrégats qui sont les habitants de l’immeuble Yacoubian :
Taha, le fils du concierge qui voulant devenir policier finira (mal) dans la Jamaa islamiya ; la belle Boussaïna au destin pour le moins contrasté ; et le vieux Zaki sous la coupe de sa sœur acariâtre Daoulet ; et Hatem le journaliste homo et son pauvre giton Abdou ; et le hadj Azzam, en crapule typique qui grâce à son pognon et à Dieu - qu’il soit loué et exalté - accédera à une députation de façade ; et les habitants de la terrasse, Malak le meilleur tailleur de chemise, Ali le chauffeur, Hamed Hawas le pinailleur juridique, etc.
Bref, cet immeuble est un distillat d’humanité Cairote et surtout un prétexte pour mettre tout ce qui fâche sur le tapis : l’homo-sexualité, la condition de la femme dans une société hyper-machiste, la corruption endémique, la réislamisation radicale, l’injustice... mais aussi l’amour, l’amitié et la solidarité.

Malgré le sévère réquisitoire qu’Alaa el Aswany nous présente là, il n’a en somme aucune intention de nuire à son pays et sa culture, il fait juste le constat effrayant qu’un régime dictatorial pratiquant une ingenierie sociale des plus barbares sur la société qu’il phagocyte, façon mafia, ne peut que s’abîmer toujours plus dans la violence, allant au bout de sa logique darwinienne où le fort écrase le faible, l’adulte profite de l’enfant, le riche du pauvre, le soldat du civil, et où toujours l’homme domine et opprime la femme ; comme si la société égyptienne n’était que la proie de psychopathes et d’opportunistes, comme si la règle n’était que le «ratio coûts-bénéfices» propre à tous les primates, comme si l’altruisme et la morale avait été éradiqué de ces lieux et de ce temps.
Nonobstant toutes ces contingences, Alaa el Aswany arrive à nous garder sur le fil en injectant une dose d'empathie et de bienveillance à certains personnages de cette fresque plutôt sombre avec l’art et le talent d’un très grand écrivain, nous permettant ainsi de goûter à la saveur de l’autre, du radicalement différent, et surtout de conclure que oui, nous sommes décidément tous pareils.

Bravo l’ami, bravo et merci pour cette merveille. 
À lire AB-SO-LU-MENT !

Alaa el Aswany est un maître et, avec la permission de Dieu - qu’il soit glorifié et exalté - un écrivain parfaitement nobélisable.


REUTERS/Asmaa Waguih


«Ne me demandez pas comment m'habiller, 
dites leur de ne pas me violer»...

dimanche 27 septembre 2015

Nos ancêtres les Gaulois, Jean-Louix Brunaux

On nous aurait menti ? !
La potion magique n’existerait pas ? !
Jusqu’à la dernière page je l’ai pourtant espéré… Macache, pas de marmite, ce vieux salaud de Panoramix nous a arnaqué !

Les gaulois ont existé, bien sûr, mais pas comme Astérix, ni comme ces vaillants ancêtres si semblables à nous que glorifia la IIIe République, ils n’étaient même pas tout à fait comme les décrit César dans sa Guerre des Gaules.
En fait la Gaule en tant que «nation» n’existait pas, il s’agissait d’une myriade de peuplades connectées de gré à gré, disons, fédérées par une langue(?) et une religion(!). En gros, au moment où César vient faire la star en Gaule, il y avait les Belges, les Celtes, les Aquitains et les Transalpins. Tout ce petit entre-soi avait fini par se stabiliser vers le Second âge de fer, Tène I, Ve siècle avant Jean-Claude. Cela dit, figure toi qu’Hésiode (VIIIe siècle avant J.-C.) parle déjà d’eux. Il est vrai que c’étaient de très bons artisans, cultivateurs, éleveurs, et d’excellents guerriers. Il est tout aussi vrai que leurs druides organisaient de grands raouts républicains dans la forêt des Carnutes durant lesquels Obélix était capable de s’enfiler quatre sangliers rôtis et ensuite de défier le Bellovèse de Jaworsky au bras de fer !

Hélas, ces couillons n’écrivaient pas, ou très peu, et bâtissaient en bois et torchis ; vas-y, toi, faire parler les ruines deux millénaires après ! Essaye de t’y retrouver ! Du coup nous voila livrés aux conjectures et aux interprétations hâtives suite à quelques fouilles souvent bâclées, préliminaires onéreux à l’édification de ces magnifiques structures cubiques et galvanisées qui enchantent les périphéries de nos villes.

Bon, tu l’auras compris, quant à nos ancêtres les Gaulois, l’ami Jean-Louis nous remet les points sur les zi(x), c’est un savant du CNRS, un pro ; on déconn’ plus, là ! Et malgré tous les clichés qu’il brûle, il nous conforte dans le penchant irrationnel à toujours plus les aimer ces Gaulois, nous offrant de nouvelles perspectives bien plus sérieuses et cependant tout aussi aimables sur ce que nous avons décidé d’appeler nos ancêtres une bonne fois pour toutes car tant qu’il existera un peuple français, ces Gaulois fantasmés en seront toujours un emblème tutélaire, au même titre que Saint-Louis, Jeanne d’Arc, de Gaule, B.H.L. ou Vincent Bolloré (rayez les mentions inutiles)..
Ils font parti de la mythologie et du paysage francaoui et je te parie que tout ça finira en banquet ou en révolution...

Plus sérieusement, ce livre est un travail savant mené dans les règles de l’art et qui balaie tous le spectre de cette “civilisation Uderzo-goscinnyenne”, corrélant les détails les plus fins de leurs us&coutumes révélés par l’archéologie moderne avec une critique objective de l’historiographie afférente.
Cela dit, je me doutais bien que Jules César écrivait ce qui l’arrangeait.

Bravo et vraiment merci à tous les amis qui me mirent la puce celte à l’oreille :
L’ami Jean-Louis Brunaux, en premier, mais n’oublions pas l’ami Denix qui fut le démiurge de cette parenthèse gauloise et, qui pis outre, me bailla en sus le superbe ouvrage réalisé par une bande d’allumés pas ordinaires qui revitalisent admirablement nos ancêtres dans «La vie du Guerrier Gaulois». Merci donc à vous aussi, amis Ludovic Moignec & Yann Kervran pour ce voyage à rebrousse-temps entousiaste et hyperréaliste.


©Panoramix




Voila, un petit peu de viagrax et ça va être prêt...

mercredi 23 septembre 2015

Voltaire

Encore une de ces remarquables petites douceurs du «Le Monde de la Philosophie».
Une compile avec trois gros morceaux de l’œuvre du grand Tomme.

- Lettres philosophiques

C’est plus jeune de trente piges et moins synthétique que son dictionnaire portatif.
Oui, à m’ment donné il en a eu sa claque de Louis XV et de ses cellotes à la Bastoch ; il traverse le channel fissa et il profitera de ses deux ans d’exil en Angleterre (1726-1728) pour étudier cette étrange société pour le moins libérale. Voltaire est en prise avec son temps, rien ne lui échappe et il consigne ses réflexions dans nombre de ces «Lettres philosophiques» ; Le parlement, les presbytériens, les Quakers, le commerce, Locke, Newton… Bref, t’en apprends plus qu’il n’en faut sur les mœurs et techniques du «XV de la rose» au temps du règne de Georges Ier.
Et puis arrive cet ovni : la vingt-cinquième Lettre, sur les Pensées de Blaise Pascal ; va savoir pourquoi car Pascal n’a jamais joué dans l’équipe d’Angleterre, non ? Mais y a un truc que l’ami Voltaire n’a pas dû digérer dans la triste métaphysique du bonhomme, sa réponse est un sommet de déconstruction !  Au passage, il dévoile la supercherie du pari sur l'existence de Dieu : un véritable bonheur, c’est vrai, quoi, je ne l’aimais déjà pas bien cet énergumène janséniste obscur et faux-cul de Pascal !

- Traité sur la tolérance 

Attention, là c’est du lourd ! Il s’agit de l’affaire Calas (1762).
Les jésuites et les barbaresques Capitouls toulousains en prennent plein la gueule !
Dénonciation, justice, équité, action… encore et toujours écraser l’infâme, concrètement en l'occurrence car c’est grâce à son Traité sur la tolérance (1765) que le procès Calas sera rouvert, le jugement des Capitouls cassé et le père Calas réhabilité.
Cet homme de plume savait mouiller la chemise quand il le fallait ; il agissait.


- Derniers écrits sur Dieu 

Bon, ce n’est pas les pages que je préfère de ses écrits au camarade Voltaire ; c’est un de ses côtés pénibles. Cette obsession de Dieu, du Grand Horloger, est un peu gonflante à la longue. Ça ne laisse pas de me chiffonner qu’un lascar de ce calibre ait eu peur du noir à ce point là, qu'il n’ait jamais osé l'absence de Dieu.
Du coup, tu peux bien te figurer, farang-marcdorcelien, que j’ai particulièrement détesté la façon spécieuse dont il traite le «Système de la nature» du pourtant excellentissime d'Holbach, mais peut-être ne suis pas objectif ; peut-être que Dieu existe, finalement ; tu vois le coup ?
Cela dit, Dieu ne me dérange pas tant qu’il reste loin, si la déraison qui anime ses adeptes exige ce monstre, qu’ils nous accordent la grâce de le tenir à bonne distance, avant la singularité primordiale qui présida à la création de notre univers, par exemple, ou dans la onzième dimension...


Voila, fin de la parenthèse Voltaire et si depuis quinze jours je ne t’ai pas encore convaincu de le lire ou relire, ça sert plus à rien que je me décarcasse.


Bravo et encore merci, Monsieur Arouet et à Dieu vat !

Ecr. L’inf.


François, Jésuite V2.0

 

Nom de Dieu ! Sachez que Voltaire grille en Enfer...

dimanche 20 septembre 2015

Dictionnaire philosophique, Voltaire

Préambule :
Soyons clairs farangis-occidentalis, si d’ici la fin de cette triste année 2015, qui ne fut vraiment pas Charlie, tu n’as pas lu ce «Dictionnaire philosophique», tu auras gâché ta vie ! Si fait.
Cela dit, tu pourras t'acheter une indulgence en revendant ta Rolex.

Ambule :
La quatrième de couve ; elle est parfaite.

«Trente ans après les Lettres philosophiques, Voltaire parachève son itinéraire de pensée et d’action avec un Dictionnaire philosophique portatif (tel est le titre de la première édition, en 1764). Foin de lourdes encyclopédies ! Portatif, un dictionnaire doit l’être, comme une arme prête à tirer à l’instant sur les cibles aléatoires qu’offre l’ordre alphabétique. Mais l’ennemi porte un seul nom, l’«infâme», qu’il s’agit d’«écraser» sous toutes ses formes, «la superstition, le fanatisme, l’extravagance et la tyrannie». Il s’appelle aussi, plus concrètement et historiquement, la Bible, avec les religions qui s’en réclament, le grand Livre auquel Voltaire ose opposer son «abominable petit dictionnaire», «œuvre de Belzébuth», comme il se plaît à le définir. Ironie, dérision, injure, indignation, sourire, gravité, le patriarche de Ferney déploie toutes les ressources de son talent pour prêcher fanatiquement la tolérance, déraisonnablement la raison. Un texte irrémédiablement daté ? Plus que jamais actuel ? Injuste, odieux ? Généreux, libérateur ? Vivant, en tout cas.»

Et ouais, qu’est-ce que tu veux que je rajoute, tout est dit !

J’avais nonobstant dans l’idée de t’extraire quelques pépites des définitions qui m’ont fait jubiler jusqu’à une heure fort avancée de la nuit dernière, mais c’est hélas impossible sans passer pour le dernier des apostats, antisémites et islamophobes.
Merci bien ! Très peu pour moi, il y a de par le monde vraiment trop de ces méchants connards hyper chatouilleux de la Bible, de l’Alcoran ou autre Torah…
Pardon ? Tu trouves que ce n’est pas un attitude très Charlie ? que je suis un couard ?

Bon, ok.
… voyons… Oh, putain sûrement pas Abraham !

… Ah, en voila une des plus courtes et des moins compromettantes, et pis les catho de par ici ne me font pas trop peur, je donne mon obole aux deniers du culte et je prends tous les ans le calendrier du groupe des scouts de St Joseph, ils sont gentils, polis et ils n’ont pas de kalachnikov...

Lettre “C” du dictionnaire, donc : Carême.
Sous titre : Questions sur le carême

«Les premiers qui s’avisèrent de jeûner se mirent-ils à ce régime par ordonnance du médecin pour avoir eu des indigestions ?
Le défaut d’appétit qu’on se sent dans la tristesse fut-il la première origine des jours de jeûne prescrits dans les religions tristes ?
Les Juifs prirent-ils la coutume de jeûner des Égyptiens, dont ils imitèrent tous les rites, jusqu’à la flagellation et au bouc émissaire ?
Pourquoi Jésus jeûna-t-il quarante jours dans le désert où il fut emporté par le diable, par le Knathbull ? Saint Matthieu remarque qu’après ce carême il eut faim ; il n’avait donc pas faim dans ce carême.
Pourquoi dans les jours d’abstinence l’Église romaine regarde-t-elle comme un crime de manger des animaux terrestres, et comme une bonne œuvre de se faire servir des soles et des saumons ? Le riche papiste qui aura eu sur sa table pour cinq cents francs de poisson sera sauvé ; et le pauvre, mourant de faim, qui aura mangé pour quatre sous de petit salé, sera damné !
Pourquoi faut-il demander permission à son évêque de manger des œufs ? Si un roi ordonnait à son peuple de ne jamais manger d’œufs, ne passerait-il pas pour le plus ridicule des tyrans ? Quelle étrange aversion les évêques ont-ils pour les omelettes ?
Croira-t-on que chez les papistes il y ait eu des tribunaux assez imbéciles, assez lâches, assez barbares, pour condamner à la mort de pauvres citoyens qui n’avaient commis d’autres crimes que d’avoir mangé du cheval en carême ? Le fait n’est que trop vrai : j’ai entre les mains un arrêt de cette espèce. Ce qu’il y a d’étrange, c’est que les juges qui ont rendu de pareilles sentences se sont cru supérieurs aux Iroquois.
Prêtres idiots et cruels ! à qui ordonnez-vous le carême ? Est-ce les riches ? ils se gardent bien de l’observer. Est-ce aux pauvres ? ils font carême toute l’année. Le malheureux cultivateur ne mange presque jamais de viande et n’a pas de quoi acheter du poisson. 
Fous que vous êtes, quand corrigerez-vous vos lois absurdes ?»


Humour, intelligence, ironie, moquitude, indignation ; tout y est, et toujours d’une extrême justesse. 
«De l'esprit, encore de l'esprit, toujours de l'esprit», Voltaire c’est le premier Charlie !
Et je ne te parle pas des définitions de «Christianisme», «Méchant», «Secte» ou «Moïse» !

Hé, il envoie le bois son petit dico.

À lire et à relire, c’est le moment ou jamais d'écraser l'infâme !







JE SUIS VOLTAIRE...

mercredi 16 septembre 2015

«Moi, j’écris pour agir», Vie de Voltaire, Max Gallo

Évidemment, la vie de Voltaire vue par Max Gallo, c’est du pur romantisme, presque du Lamartine. Mais je te l’ai déjà assez seriné, j’aim’ beaucoup ce qu’il fait, l’ami Max.
Alors, bien sûr, quand la plume de ce bougre d'académicien raconte Voltaire, là, c’est du grand art !

Or donc, notre bon Voltaire est né François Marie Arouet en 1694 et rendit l'âme à son Dieu du cosmos en 1778 en tant que «Messire François Marie Arouet, chevalier, gentilhomme ordinaire de la Chambre du Roi, comte de Tourney, Prégny et Chambésy, seigneur de Ferney».

Tout du long de sa vie il va inlassablement commettre des dizaines de pièces, de Lettres, de pensées, de pamphlets, etc., presque tous aussi polémiques les uns que les autres, s’attirant toujours plus de haine de la part de ses puissants comptenteurs ; il jettera l’opprobre sur les affaires Callas, Sirven ou du chevalier de la Barre ;  il traquera l’intolérance religieuse grâce à son arme de destruction massive : l’ironie.
Une ironie qui confine presque à la méchanceté, une propension certaine à mettre la plume là où ça fait mal, au plus profond des incohérences des «Arlequins anthropophages» du christianisme, car c’est cela qui le motive, il hait les religions et ses tristes zélotes tyranniques, c’est le champion toutes catégories de la lutte anticléricale. Son leitmotiv :  «Écrasons l’infâme», où, tu l’auras compris, l’infâme n’est autre le christianisme en particulier et toutes les formes de dogmatisme religieux en général ; il n’en est pas moins cruel et incisif avec les Juifs, les mohametants, les hindous, et autres sectes déraisonnables.
Pourtant il ne sera jamais athée ; c’est un déiste (théiste au sens philosophique), il est convaincu qu’un grand ordonnateur, Dieu, pour nous totalement insaisissable, préside à la bonne marche de la nature afin que tout son fourbi (les soleils, leurs planètes, notre ciel bleu, la marée des océans, l’herbe, les vaches, les gens, bref, tout !) tourne correctement et de la façon la plus harmonieuse possible. Contrairement à Diderot qui a commencé déiste, mais a fini athée, il ne mettra pas le pied dans le vide d'une absence de Dieu.
Fan de Newton et de sa métaphysique par le biais d’Émilie du Châtelet, il s’opposera aussi à la spiritualité dynamique des monades de Liebnitz et pour t’en convaincre, infâme farang, qu’il te suffise de relire l’entrée «Âme» de son dictionnaire philosophique portatif !
C’est le chef de file des philosophes des Lumières : les Diderot, d’Alembert, Helvétius, etc., et, cerise sur le gâteau, il finira par s’essuyer les pieds sur le triste sire Jean-Jacques Rousseau… Bien fait !
(Quel faux-cul, ce crypto-calviniste de Rousseau ! )

Quant aux turpitudes de la fesse et sans être un Don Juan, l’ami Voltaire a eu son content de frangines ; Olympe Dunoyer ; les actrices Suzanne de Livry et Adrienne Lecouvreur ; bien sûr, Émilie du Châtelet ; et il a même fini à la colle avec sa jeune nièce Marie-Louise Denis !

Ceci étant, il comprend très vite qu’il ne fait pas bon être pauvre dès lors qu’on taquine les puissants et ce qui sauve réellement notre glorieux écraseur d’infâmes, c’est qu’il gagne une petite fortune en 1728 grâce à une astuce du mathématicien La Condamine, lequel a trouvé le moyen de légalement détourner sans coup férir les gains de la loterie que vient de lancer le contrôleur général des Finances.
Bingo ! Les dollars affluent et notre homme s'avèrera être un investisseur habile, avisé, voire carrément cupide.
Fortune faite, il est libre et ne se gênera plus pour traquer l'injustice et tourmenter de sa plume acide tous les bigots qui comptent dans l’Europe du XVIIIe. Hélas, il y a un revers à cette médaille : il va souvent déménager. Très refroidi par ses onze mois à la Bastille, il sera obligé de rester loin de Paris, de sa cour et des Jésuites.
Au bout d'une longue errance d'une capitale l'autre, il finit cependant par se poser à Ferney, un pied en France et un pied en Suisse et continuera inlassablement à bouffer du curé jusqu’en 1778, l'année où Louis XVI lui permet enfin de regagner Paris, après vingt huit ans d’exil. Il y mourra trois mois plus tard, non sans avoir triomphé avec sa dernière pièce, Irène.

Il sera le deuxième personnage de France à être panthéonisé (1791), derrière Mirabeau (1791-1794) et, contrairement à ce dernier, il devrait y être encore...
Je ne peux pourtant pas m’empêcher d'être bien aise qu'il soit mort, grâce à Dieu, avant la Révolution ; m’est avis qu’il n’aurait pas goûté le tranchant des rasoirs de Robespierre : TCHACK !!!

Mais trêve d’uchronies hasardeuses, la vie de ce géant du génie français (cocoricoooo !) était passionnante.

Mille merci l’ami Max.

Ecr. L’inf.





Exercice numéro 1 :
Identifiez l’infâme...

jeudi 10 septembre 2015

Sieyes, la clef de la Révolution Française, Jean-Denis Bredin

Brrr... 
Y m’fout la trouille cet Emmanuel-Joseph Sieyès.

Celui-là aussi a plié l’échine sous les fourches caudines des jésuites dans sa jeunesse et il finira même ses études dans un froc ; l’abbé Sieyès, l'appelleront souvent ses détracteurs !

Cela dit, les jésuites ont fabriqué des têtes redoutablement bien faites en ce siècle qui jetait déjà ses premiers éclats de lumière (Montesquieu, Voltaire, Diderot, Condorcet, etc.) ; brindilles enflammées qui allaient immoler l'ancien régime sur le bûcher de la Révolution.
Car oui, Sieyès déteste viscéralement la noblesse, et utilisera tout ses moyens intellectuels pour l’abattre.  
Il votera la mort «sans phrase» de Louis Capet.
Mais ce n’est pas que ce personnage autiste et ascétique Sieyès, c’est aussi et surtout un remarquable «calculateur» ; ces processeurs massivement parallèles, sa culture et son éducation en font un joueur extrêmement efficace et pertinent dans la partie qui se déroulera entre 1789 et le 18 Brumaire (1799).
Songe, farang-jacobin, qu’il est un des rares malins à passer entre les gouttes de la Terreur, et il a même survécu à Robespierre et Napoléon, te dire le roué personnage auquel nous avons à faire.
Ombrageux, succeptible à l’excès, presque un pur esprit, il calcule, s’avance, se retire, revient ; c’est l’homme qui marquera la décennie qui va de la constituante jusqu’au consulat.
Il précède déjà la révolution, il l’ouvre même avec des publications telles que : Qu’est-ce que le Tiers Etat ?
...
« Qu'est-ce que le Tiers-État ? Le plan de cet Écrit est assez simple. Nous avons trois questions à nous faire:
1) Qu'est-ce que le Tiers-État ? Tout.
2) Qu'a-t-il été jusqu'à présent dans l’ordre politique ? Rien.
3) Que demande-t-il ? À y devenir quelque chose. »
...

Que de «futurs» dans ces quelques phrases.

Sieyès anime et accompagne la révolution avec les Mirabeau, Talleyrand, Duport, Condorcet, etc., ou combat ceux dont il se garde, à l’instar de son ennemi intime Robespierre.
L’excellent Jean-Denis Bredin insiste même sur la similarité de ce ying et de ce yang que sont Sieyès et Robespierre ; leur parcours laborieux leur a imposé ascèse et rigueur, et malgré les ragots afférents à quelques turpitudes fessières cachées, ces deux là n’aimaient pas se mélanger à leurs semblables, ils n’ont vécus que pour l’idée géométrique qu’ils se faisaient des hommes ; c’étaient des sociopathes !
Bon, ça finira de façon pathétique pour cézigue, après les 100 jours, il sera exilé à Bruxelles comme régicide, de 1815 à 1830… petite vengeance de la seconde restauration, disons.

Cela dit, bien que figure nécessaire et incontournable de la Révolution, ce n’est pas un homme aimable ; il demeurera pour moi toujours entaché de ce fond de curetonaille opportuniste et malodorant et vous souffrirez que je reste solidaire de ma subjectivité, malgré tous les efforts (600 pages) de l’ami Jean-Denis Bredin.

Merci, nonobstant, cher et rigoureux historiographe, pour ce monument dont il ne faut pas rater une seule des innombrables notes en bas de page.

Je le mettrai en pature sur mon bureau dès demain matin, mais je sais déjà qu'il ne fera pas florès auprès de mes coreligionnaires ; tant pis pour eux... 
De toutes les façons, il ne faut pas démarrer la «Révolution» par Sieyès, ce n'est pas un personnage assez sympathique pour susciter l’enthousiasme ; il y a un parcours initiatique obligé pour ce faire : tu démarres par les milliers de pages de Michelet, ensuite tu t'appuies les énormes Girondins de Lamartine et seulement après tu te plonges dans les détails des personnages emblématiques par le biais d'une foultitude d'écrivains passionné(e)s... 
Là ça devient une véritable histoire au long cours, une épopée des temps pré-modernes. 
Là tu te feras délicieusement piéger...


Sieyès





La taupe de la Révolution...

mercredi 9 septembre 2015

Le Rêve de d’Alembert, Diderot

Il est pas fou, Diderot, de nous raconter les rêves de d’Alembert ? Sont-ce des façons d'inquiéter les braves gens, je te le demande ?
Il avait des idées “révolutionnaires” cézigue, ça fout même la trouille dans la dernière partie, quand Bordeu (le docteur) fait l’apologie des pires licences qu’ils soient loisible d’imaginer en 1769 !
Mais, basta, je commence par la fin, là…

Plouf... Plouf...

Évidement, ça reprend l’Entretien entre D’Alembert et Diderot, qui se prolonge par Suite de l’entretien entre D’Alembert et Diderot, puis on passe au vif du sujet, Le Rêve de D’Alembert, et tout cela se termine par Suite de l’entretien précédent.
Il s’agit de dialogues imaginaires qu'il met dans la bouche de gens qu’il côtoyait au quotidien et qu’il aimait ; cela dit, il aimait tout le monde l’ami Denis, mais en mettant en scène Mlle de Lespinasse, d’Alembert, le Dr Bordeu, et, sous prétexte d’un rêve, il nous entraîne dans ce qu’il faut bien appeler des exercices de l’esprit. Bien sûr c’est le vitalisme matérialiste animant déjà son Encyclopédie qui souffle dans ces pages, il explore toutes les pistes qu’offrent les sciences modernes pour convaincre ses contemporains de sortir “Dieu” de l’équation… vaste programme car les crétins tonsurés qui avaient l’oreille de Louis XV étaient aussi ouverts et éclairés que ne l’est présentement le triste sire Abou Bakr al-Baghdadi ! Quand ces mecs là sont aux manettes, faut pas aller tirailler les Dieux par la barbichette, expliquer des trucs qui vont à l’encontre des navrantes stupidités de son temps et de son lieu ; surtout ne jamais écrire sous son véritable nom des lignes dans le genre de celles-ci :

[...] Qui sait les races d’animaux qui nous ont précédés ? qui sait les races d’animaux qui succéderont aux nôtres ? Tout change. Tout passe. Il n’y a que le tout qui reste. Le monde commence et finit sans cesse. Il est à chaque instant à son commencement et à sa fin. Il n’en a jamais eu d’autre, et n’en aura jamais d’autre. Dans cet immense océan de matière, pas une molécule qui ressemble à une molécule ; pas une molécule qui se ressemble à elle-même un instant. Rerum novus nascitur ordo (Un nouvel ordre des choses naît), voilà son inscription éternelle…

Tu comprendras, farang-ecclésiastique, que les puissants, tenant leur pouvoir de Dieu et de tout le tremblement de Sa permanence, ont du tiquer quand ils ont lu que le monde ne s’était pas créé en 35h (©Martine Aubry), etc.
Dans les dernières pages il finit même en visionnaire de la bio-ingénierie du futur par le truchement de Bordeu qui se fait le concepteur d’une chimère dénommée «chèvre-pied», véritable leçon inaugurale à l’optimisation stochastique évolutionnaire. Sans parler des sous-entendus à peine masqués sur des mœurs vraiment très, très post-soixante-huitardes qui pourraient avoir cours dans le futur...

Enthousiaste convaincu, curieux et visionnaire cézigue Diderot.
Il a presque toujours été obligé d’avancer masqué car les censeurs de l’establishment avaient tous pouvoirs sur les «esprits forts» de leur siècle ; il n’avait pas la fortune d’un Voltaire, il était tenu de rester à Paris, fallait bien qu’il trouve des subterfuges pour continuer à ramener sa grande gueule !
Quoi de mieux que des dialogues imaginaires autour du rêve d’un grand homme de son temps (d’Alembert)...

Encore bravo et merci pour tout, cher géant.



©Chèvre-pied
stochastiquement évolué



Et fous troufez fa drôle...